Chroniques

par laurent bergnach

Le Philharmonique de Berlin et le IIIe Reich
un portrait du Reichsorchester

1 DVD Arthaus Musik (2008)
101 453
Le Philharmonique de Berlin et le IIIe Reich

En 2007, l'Orchestre Philharmonique de Berlin (Berliner Philharmoniker) fêtait le cent vingt-cinquième anniversaire de sa création par des musiciens mécontents de leurs conditions de travail au sein de la Bilse Kapelle – futurs actionnaires de leur propre entreprise. Que représentent une douzaine d'années dans l'histoire d'une telle formation ? Peu de chose, à moins d'avoir rendez-vous avec l'Histoire, comme ce fut le cas dans la période 1933-1945.

Très vite, Goebbels, ministre de l'Éducation populaire et de la Propagande, comprend que cet orchestre – qui accumule les succès autant que les difficultés financières – représente un porte-parole culturel à ne pas négliger, en Allemagne autant qu'à l'étranger. Dès octobre 1933, son financement intégral est donc pris en main et, le 15 janvier 1934, l'État achète toutes les parts de la société qui devient définitivement un orchestre d'État (Reichsorchester).

Au fil des années, les inscriptions au Parti nazi des musiciens s'organisent, soit par ambition professionnel, par principe de précaution ou encore par conviction fervente comme le trompettiste Anton Schuldes qui se porte volontaire pour le combat, quelques semaines avant la défaite. Malgré tout, ces partisans représentent une faible part (moins d'un sur cinq) pour une majorité qui conserve son esprit critique et déplore le départ de collègues juifs suite aux pressions – Szymon Goldberg, Gilbert Back, Joseph Schuster et Nicolai Graudan. Malgré la honte de récupérer des instruments d'origine inconnu ou celle de se produire devant des soldats mutilés, chacun essaie d'oublier la guerre. « On faisait notre travail. On était heureux de jouer de la musique », résume un des témoins de l'époque.

Entre les anecdotes des pères et des fils – les denrées ramenées de ces tournées qui resserrent les liens, les concerts programmés en fonction du couvre-feu, le tout dernier avant l'invasion russe et le suivant, composé d'œuvres interdite sous Hitler, etc. –, Enrique Sanchez Lansch nous offre de nombreuses images d'archives où l'on voit diriger pas moins qu’Erich Kleiber, Bruno Kittel, Clems Kraus, Hans Knapperbusch, Sergiu Celibidache ou encore le Professeur Georgesco.

LB