Chroniques

par pierre-jean tribot

Ludwig van Beethoven
Concerti pour piano Op.19 n°2 – Op.58 n°4

1 CD Satirino (2005)
SR 051
Ludwig van Beethoven | Concerti pour piano n°2 – n°4

Face à la crise du disque qui perdure, le milieu musical a dû se faire justice afin de trouver des solutions pour exister discographiquement. Ainsi différents acteurs musicaux, et non des moindres, se sont-ils lancées dans l'aventure de labels autoproduits. Cette mode fut initiée par le London Symphony Orchestra, avant de faire son chemin auprès d'autres institutions comme le Koninklijk Concertgebouworkest d'Amsterdam ou le Festival d'Ambronay. Dans un second temps, on observa la création de labels par des artistes dans le but de fixer sur platine leurs versions des chefs-d’œuvre. Le présent disque, esquisse d'une intégrale des concerti pour piano deBeethoven, franchit un nouveau pas dans le domaine car il a été initié par l'agence artistique parisienne Satirino.

Dans une discographie autant chargée de références, on est toujours assez dubitatif devant chaque nouvelle parution. D'autant plus que le pianiste Barry Douglas n'est pas l'artiste que l'on associe spontanément à ce répertoire. Après des débuts de carrière tonitruants qui le virent décrocher un prix au concours Tchaïkovski de Moscou en 1986, ce musicien irlandais multiplia les engagements dans les plus grandes salles de concert et signa un contrat d'enregistrement avec la firme RCA. Aux côtés de disques fonctionnels dans un répertoire de costaud (Brahms, Rachmaninov), le pianiste signa tout de même deux disques fascinants dédiés aux œuvres pianistiques de Britten, Reger, Debussy et Strauss sous la baguette de Marek Janowski à la tête du Philharmonique de Radio France.

Dirigeant du piano la Camerata Ireland, un orchestre de chambre dont il est le fondateur et qui regroupe la crème des instrumentistes tant de l'Eire que de l'Ulster, Barry Douglas nous bluffe dans un sublime Concerto en si bémol majeur Op.19 n°2. Le discours avance avec fluidité et les tempi sont justes. En dépit d'un manque de fondu des phrasés et de timbres un peu verts, défauts certainement imputables à sa jeunesse, la phalange réagit aux moindres sollicitations du pianiste. Le second mouvement est superbe d'abandon et de dialogue entre le soliste et son orchestre ; les premier et troisième sont menés avec autant de classe et de spontanéité.

Malheureusement le Concerto en sol majeur Op.58 n°4 amène certaines désillusions. L'interprète n'arrive pas à saisir l'esprit des premier et deuxième mouvements. Le discours est haché, instable et les sonorités sont dures. Ce manque de détermination est transmis à l'orchestre qui ne sait plus trop où aller. Seul le dernier épisode, dont l'esprit léger et juvénile est assez proche du Concerto n°2, leur réussit. Un demi disque, certes, mais qui donne envie d'entendre la suite de cette intégrale.

PJT