Chroniques

par pierre-jean tribot

Ludwig van Beethoven
Concerti pour piano n°1 – n°2 – n°3 – n°4 – n°5

1 coffret 3 CD Transart Live (2006)
TR 137
Ludwig van Beethoven | Concerti pour piano n°1 à n°5

La crise du marché du disque ne semble pas décourager les éditeurs qui continuent à proposer aux amateurs les piliers du répertoire. Ainsi, alors qu'on dénombre différentes intégrales en cours desconcerti pour piano et orchestre de Beethoven (Yefim Bronfman chez Arte Nova ou Barry Douglas pour le label Sartirino [lire notre critique du CD]), il faut compter avec cette nouvelle somme proposée par le pianiste Georges Pludermacher accompagné par l'Orchestre de Bretagne conduit par son nouveau chef permanent : Mosche Atzmon.

Georges Pludermacher s'est imposé comme une figure incontournable du clavier français. Auteur d'intéressantes intégrales des sonates de Beethoven et de Schubert (pour ce même label Transart), grand amateur de jazz et de musique contemporaine, ce pianiste est de ceux qui ne se contentent pas de fatuité et de facilité. Pour affronter cet Everest de la musique que sont les concerti pour clavier de Beethoven, le soliste possède de nombreux atouts : une conception limpide qui satisfait la progression musicale, une excellente technique et un toucher plutôt léger. Les choix detempi assez rapides se révèlent d'une grande pertinence.

En dépit d'une prise de son un peu feutrée, l'écoute commence par une merveille : un Concerto Op.15 n°1, juvénile et bondissant à souhait. L'orchestre, pourtant faiblement caractérisé au niveau des timbres, suit avec respect et vaillance. Malheureusement les choses se gâtent au fil des concerti. L'orchestre et le soliste semblent prendre des chemins séparés. Dès le deuxième (Op.19), on entend un accompagnement probe, mais raide et scolaire, suivre un pianiste léger et alerte. Ce dernier connaît un gros passage à vide dans le Concerto Op.37 n°3 où l'oreille est accrochée par la dureté des accords. L'avant-dernier concerto (Op.58) nous ramène vers l'éclatante réussite du premier. L'artiste, poétique et attentif, campe un Beethoven musical mais somme toute assez félin. En dépit d'un sérieux manque de coffre, l'orchestre se libère dans un Empereur (Op.73 n°5) de belle facture. Pludermacher évite savamment toute excessive grandiloquence, pour se concentrer sur la finesse du discours, mais il peine à négocier les transitions entre les thèmes qui sonnent, là encore, trop durement.

En conclusion, cette intégrale, enregistrée en concert, portée par un excellent pianiste peinera à s'imposer dans une discographie aussi pléthorique que qualitative. Si les baisses d'inspirations du soliste peuvent s'expliquer par l'exercice hautement périlleux du concert, on ne peut passer sur les carences de la phalange bretonne. Le chef d'orchestre n'est pas en cause, mais l'absence d'homogénéité et la fadeur des timbres surprennent tant la progression internationale du niveau des orchestre est une constante depuis de nombreuses années. Il faut également mettre au crédit du label Transart le joli digipack technicolor qui porte ces disques.

PJT