Chroniques

par samuel moreau

Luigi Boccherini
Concerti pour violoncelle n°9 à n°12

1 CD Naxos (2004)
8.557589
Luigi Boccherini | concerti pour violoncelle

Né en Toscane en 1743, dans la belle ville de Lucca, Luigi Boccherini est mort à Madrid en 1805. Sa famille était des plus cultivées. Le frère aîné, danseur et chorégraphe, était aussi poète : il écrivit, entre autres, des livrets d'opéra pour Salieri et le texte d’Il ritorno di Tobia, l'oratorio de Haydn ; la sœur dansait également, faisant carrière à Vienne, et leur père jouait de la contrebasse en professionnel. Lui-même fit ses débuts à treize ans, comme violoncelliste. En 1757, parti à Rome pour y étudier, il n'y resta que quelques mois, son père et lui ayant été convoqués à Vienne pour jouer dans l'orchestre de la Cour ; il avait à peine quinze ans.

Dès lors, sa vie fut faite de travail et de voyages. Avec le violoniste Filipo Manfredi, il se rendit à Paris pour une série de concerts, en 1767 – où il fit éditer quelques compositions –, puis à Madrid l'année suivante. Il développa alors son intérêt pour la musique de chambre. Après la mort de l'Infant Don Luis, son principal employeur, il travailla pour l'héritier du trône de Prusse. De nouveau, la disparition du roi (1798) l'oblige à chercher un nouveau mécène. Il décline l'offre d'enseigner au Conservatoire de Paris et retourne à Madrid. Ses dernières années, uniquement consacrées à la composition, sont vécues dans de fortes difficultés financières et émotionnelles (perte de sa seconde épouse, de ses deux filles).

Boccherini avait commencé un catalogue de ses propres œuvres, disparu dans la tourmente de la guerre civile espagnole. En 1969, Yves Gérard en publia un nouveau, définitif, qui recensait onze concertos. Le Douzième concerto pour violoncelle fut seulement découvert en 1987, dans une librairie napolitaine. À part celui-ci (de 1722, et bien loin du maniérisme rococo), ce sont probablement des œuvres de jeunesse, datant d'avant son arrivée à Madrid. Elles exploitent une technique virtuose, particulièrement remarquable dans les passages extrêmement rapides attachés aux registres le plus haut de l'instrument. Arrêtons-nous juste sur le Concerto n° 11, partition unique dans son œuvre, pour violoncelle, deux hautbois, deux trompettes, cordes mais aucun cor. Cet instrumentarium donne un son d'une clarté presque cérémoniale, ouvrant des pistes sur la manière de composer de l'artiste : letutti d'ouverture possède des harmonies très claires et un rythme harmonique plus lent. La suite est aussi inhabituelle : le Largo cantabile est conçu pour violoncelle solo, mais deux brefs passages d'orchestre ouvrent et ferment le mouvement.

Le violoncelliste Raphael Walifish (élève de Gregor Piatigorsky) et le violoniste Nicholas Ward (élève de Yossi Zinovi et André Gertler) sont des habitués de la musique de chambre ; le premier pour avoir participé à des récitals informels que donnait chez lui son professeur, le second pour avoir formé son propre quatuor à cordes... à l'âge de douze ans ! Ward est directeur artistique du Northern Chamber Orchestra domicilié à Manchester, qui est depuis 1967 une des formations les plus réputées d'Angleterre. Il le dirige ici avec une belle égalité d'expression, un véritable équilibre classique – entendons sans nul contraste anachronique – remarquable dans la balance du tutti avec le soliste, minutieusement préservée.

SM