Chroniques

par anne bluet

Mogens Pedersøn
madrigaux à cinq voix

1 CD Dacapo (2002)
8.224219
Mogens Pedersøn | madrigaux

Vice-maître de chapelle du roi Christian IV de Danemark qui protégea les arts tout au long d'un règne impressionnant (soixante ans !), Mogens Pedersøn (1585-1623) est le premier compositeur danois dont nous est parvenu un grand nombre d'ouvrages et quelques éléments conséquents de biographie. Il fut l'un des premiers à prendre une envergure internationale, avant les Kunzen, Schulz, Weyse qui apparaîtront au XVIIIe siècle.

Apprenti au King's cantori, le jeune Pedersøn effectue un voyage d'étude à Venise. Si la cité a perdu quelque peu de sa suprématie politique ou commerciale, elle conserve son influence musicale. Le grand maître de l'époque, en ce domaine, est Giovanni Gabrieli, visité par nombre de compositeurs européens (comme Schütz, entre autre) et dont les œuvres vocales et instrumentales exploitent les possibilités acoustiques de la basilique et de ses nombreuses galeries. Un lien s'établit donc entre le professeur vénitien et son jeune élève, surtout lors du séjour vénitien du Danois, de 1605 à 1609. Tout indique que la pédagogie de Gabrieli s'applique par la mise en musique de textes, soit sacrés en vue de motets profanes, soit séculiers pour en faire des madrigaux. Une fois le résultat jugé satisfaisant, une édition des madrigaux réalisés venait récompenser les efforts de l'apprenti compositeur. Le tour de Pedersøn vint en 1608, avec l'impression de vingt-et-une de ses œuvres, sous-titré Libro primo, comme s'il avait déjà en tête la suite de sa carrière…

Deux ans après son retour au pays, il repart encore, en Angleterre cette fois. Ses amis compositeurs l'accompagnent : Jacob Orn et Hans Brachrogge. On retrouve la trace de dix madrigaux, copiés par un détenu anglais, signalant leur appartenance à un Second Livre. En 1618, alors que la charge devient trop grande pour Melchior Borchgrevinck, un poste d'adjoint est créé par le Roi pour la première fois, et c'est Pedersøn qui en bénéficie. Il assume ses nouvelles responsabilités jusqu'à sa mort, cinq ans plus tard.

L'œuvre majeure du compositeur est un recueil intitulé Pratum Spirituale (en vulgaire La Prairie Spirituelle), composé de vingt-et-un hymnes danois, de motets latins et de chorals dans ces deux langues. Cette collection était conçue pour un usage professionnel des chœurs d'église et occupa cette fonction pendant plus d'un siècle.

Ensemble vocal habitué aux chants polyphoniques de la Renaissance, Musica Ficta s'intéresse depuis ces dernières années aux trésors des madrigaux européens. C'est le compositeur et chef Bo Holten qui dirige cet enregistrement fort intéressant des madrigaux de Pedersøn dans lesquels Musica Ficta affirme une appréciable virtuosité, malgré une couleur générale souvent terne. Il conviendra de saluer cette initiative qui rend un bel hommage à un musicien aujourd'hui peu joué.

AB