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Chroniques
Nicolas Derny
Erich Wolfgang Korngold
Parfaitement intégré à la vie musicale viennoise du début du XXe siècle, Erich Wolfgang Korngold (1897-1957) montre un talent précoce loué par Gustav Mahler – en cela précurseur des admirations de Berg et Puccini. Après la création du ballet-pantomime Der Schneemann (1909), d'autres éloges suivront qui, comme les attaques subies, doivent être considérées avec prudence : Erich est en effet le fils de Julius Korngold, un diplômé en droit devenu ce critique musical (tristement) célèbre qui met à mal les épigones de Schönberg, le chef d'orchestre Felix Weingartner ou encore Ernst Krenek, déjà sur la sellette nazie.
Au fur et à mesure de ses progrès, le compositeur en herbe passe des modestes cours de piano d'Emil Lamm à ceux d'harmonie et de contrepoint de Robert Fuchs. La rencontre la plus décisive demeure celle d'Alexander von Zemlinsky, lequel part malheureusement travailler à Prague en laissant un élève plein d'ambition qui rêve bientôt d'opéra.
Commencé en 1913, Der Ring des Polykrates est suivi par Violanta (1916), Die tote Stadt (1920) [lire notre critique du DVD], Das Wunder der Heliane (1927) [lire notre critique du CD] et Die Kathrin (1939). Plus ou moins bien reçus, ces ouvrages lyriques déconcertent et conduisent le jeune marié à subsister grâce à un emploi de chef d'orchestre itinérant. Après avoir refusé les premières offres des studios de cinéma, Korngold va ensuite révolutionner la musique de film outre-Atlantique, au milieu des années trente. Nicolas Derny traite avec beaucoup de détails cette période – une des plus passionnante du livre – qui se termine par le retour si attendu en Europe et cette réflexion douce-amère : « Quand je suis arrivé à Hollywood, je ne pouvais pas comprendre les dialogues, maintenant je peux. »
Une fois encore, quand tant d'autres font leur beurre avec des compositeurs baroques ou romantiques cent fois mis sous presse, l'éditeur suisse nous offre la rencontre d'une personnalité originale et attachante, dont les œuvres ne sont pas toujours prises au sérieux. Grâce à une analyse rapide de celles-ci, alternant avec un portrait vivant du Viennois et une riche iconographie, nul doute que le lecteur aura envie de (ré)écouter ses nombreux opus chambristes, finalement peu connus.
LB