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Chroniques
Olivier Greif
L'Office des Naufragés
Prématurément disparu en 2000 à l'âge de 50 ans, le compositeur Oliver Greif était en passe de s'affirmer comme l'un des plus intéressants créateurs de son époque. Personnelle et généreuse, sa musique était acclamée par la critique et fort prisée du public. Natif de Paris, l'artiste étudie le piano et la composition au Conservatoire auprès de Tony Aubin, Marius Constant, Jean Hubeau et Lucette Descaves. En 1969, il part se perfectionner à la Julliard School sous la houlette de Luciano Berio avant de devenir assistant à l'Opéra de Santa Fé. Compositeur, mais aussi pianiste, Greif poursuit une carrière internationale qui le conduit à travers les cinq continents jusqu'à ce qu'une longue démarche spirituelle le décide à interrompre pendant une dizaine d'année sa carrière. Au cours des années quatre-vingt dix, il reprend une intensive activité que la mort vient brutalement interrompre. Auteur d'un vaste catalogue de près d'une centaine d'œuvres, Greif aimait particulièrement la voix alors qu'il se plaisait dans tous les genres musicaux : sonates, trios, quatuors, concerto, symphonies, opéra, etc.
L'Office des Naufragés est une commande du clarinettiste Eduard Brunner. La partition fut créée en 1998 au Schauspielhaus de Berlin. L'œuvre se présente comme une sorte de Chant de la terre pour petit ensemble avec récitant, voix soliste et clarinette obligée. Inspirée de la littérature féminine, à l'exception des textes de Paul Celan, la partition se veut une « sorte de rituel quasi-religieux ». La condition humaine et le destin apparaissent comme les symboles de ces naufragés musicaux. Le compositeur représentait la vie comme une navigation vers des rives infernales ou idylliques. Structurée en dix parties, la pièce dégage une intense émotion digne des grands compositeurs narratifs du XXe siècle : Mahler, Chostakovitch, Britten ou encore Bernstein. Les amateurs d'avant-garde et d'instrumentarium percussif devront rendre les armes devant une partition suggestive riche en tensions où le texte porte littéralement une musique douloureuse et abandonnée.
L'interprétation de l'ensemble Accroche Note est idéale de ton. Il faut saluer particulièrement les prestations du clarinettiste Armand Angster et du soprano Françoise Kubler.
PJT