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ouvrage collectif
Composer au XXIe siècle
Proposés durant l’année 2007 à Montréal, deux événements ont conduit à cet ouvrage nourri d’une quinzaine de contributions : un colloque Composer au XXIe siècle : processus et philosophies ainsi que des journées d’études L’improvisation dans tous ses états. Le but des organisateurs était – comme le rappelle l’un d’eux, la musicologue Sophie Stévance qui supervise la publication – de permettre « une réflexion effective et prospective sur les faits et gestes du compositeur […], de mieux cerner les différents enjeux et les caractéristiques contemporaines de ce « métier », ses évolutions les plus significatives, mais également de constater ce qu’il est et ce qu’il fait dans la société d’aujourd’hui afin d’imaginer ce qu’il pourrait devenir ».
Dans quelle mesure se définit-on comme compositeur, d’un point de vue personnel mais aussi institutionnel et social ? La question se pose nécessairement quand le salaire que perçoivent les trentenaires provient d’une activité parallèle (enseignant, ingénieur du son, etc.), à un âge où l’on cherche encore sa propre esthétique. Beaucoup de jeunes se présentent donc avec modestie, comptant sur d’éventuelles commandes pour consolider leur identité de créateur. Comme le signalent plus d’un article, ces « carrières plurielles » s’inscrivent dans un temps d’esthétiques mêlées (retour à la tonalité, promotion du timbre, etc.) où les chapelles laissent place à des projets hybrides (scène jazz ou rock, installation sonore, vidéomusique, etc.)
Tandis que quelques pièces sont analysées ici et là – Mémoriale de Boulez, Wagner Dream d’Harvey, eXpress de Piché, etc.), plusieurs compositeur retracent leur parcours vers telle ou telle exploration : Stéphane Altier confie son souhait d’un jeu adapté à un contexte inconnu (nommé improvisation expressive) ; Jérôme Blais décrit une « partition en mouvement » (assemblage de fragments musicaux à l’avance ou en temps réel) ; Georges Dimitrov propose une alternative à l’organisation commune des hauteurs ; etc. D’autres encore – Philippe Leroux, Isabelle Panneton –, par le biais de l’entretien, font part de leurs attentes et convictions dans un temps où il n’y a plus de tradition à briser.
Plus de tradition ? Pas si sûr ! Les propos de Panneton, compositrice et professeure, sont une ultime occasion de parler de la condition de femme dans la vie musicale, évoquée comme un fil rouge. Son affirmation « on sent que certains hommes ont encore du mal à admettre qu’une femme ait atteint un haut niveau de création » résume bien des confessions qu’on croirait d’un autre temps – « Qu’est-ce qu’une jolie fille comme toi fait ici ? » (un professeur de l’Académie Sibelius à Kaija Saariaho) ou « Félicitations, on dirait vraiment une musique de mec ! » (compliment adressé à Florence Baschet). La révolution artistique est-elle condamnée à devancer l’évolution sociale ?
LB