Chroniques

par samuel moreau

récital Cecilia Bartoli
Hôtel Savoy (1991)

1 DVD Decca (2004)
071 141-9
Un portrait d'une cinquantaine de minutes suivi d'un concert à l'Hôtel Savoy

C'est une Cecilia Bartoli presque au début de sa carrière que nous découvrons dans ce documentaire de 1992. Un portrait d'une cinquantaine de minutes précède le concert à l'Hôtel Savoy, et disons-le tout de suite, nous sommes séduits.

Prenant le prétexte de répétitions à la Fenice, en compagnie de certains témoins de son entourage, nous revenons sur des moments de sa formation musicale. Fille d'un ténor lirico spinto et d'une soprano, c'est cette dernière qui remarque une facilité pour le chant colorature et s'improvise professeur. Silvana Bartoli, avec tendresse mais sans concession, surveille les progrès de sa progéniture, érigeant la volonté et l'autodiscipline comme éléments essentiels à la conduite d'une grande carrière. Admirateurs autorisés, Christopher Raeburn, directeur artistique de la jeune femme, est sensible à la fraîcheur, au naturel de celle qu'il défini comme une mezzo-soprano assez légère, mais avec une voix très ronde, tandis que Rodney Milnes (rédacteur à Opera Magazine) parle d'une voix céleste associée à une technique irréprochable, d'un chant qui passe aussi par les yeux.

Entre flânerie en gondole et balades en Fiat 500, Cecilia prend la parole à son tour. D'une voix quasiment enfantine, dépouillée de la belle couleur sombre qui fait son chant, elle nous parle de la petite porte du paradis qu'elle a ouverte en découvrant Mozart – loin du génie terrien qu'est Rossini –, de son refuge toscan (Porto San Stefano) où elle se repose de sa vie de « bohémienne privilégiée », de sa relation presque sexuelle avec la nourriture... On ne nous avait pas menti sur son grand sens de l'humour !

C'est en été 1991 que la cantatrice donna ce récital londonien, à l'Hôtel Savoy. Le pianiste György Fischer l'accompagne. Elle débute son récital par des airs baroques (Pergolesi et Vivaldi), mais retrouve bien vite ses deux compositeurs fétiches, Mozart – In uomini, in soldati (Cosi fan tutte) ; Deh, per questo istante (La clemenza di Tito) ; Voi che sapete (Le nozze di Figaro) – et Rossini. Nous découvrons un compositeur plus sérieux, loin de la plaisanterie facile auquel il est souvent associé. S'il y a ici des airs enjoués – La regata veneziana, trois chansons en dialecte vénitien ; Canzonetta spagnuola ; etc. –, ils alternent avec des moments plus recueillis, où l'émotion finit par l'emporter sur la simple virtuosité.

SM