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Chroniques
récital Norah Amsellem
Debussy – Duparc – Poulenc
Voici un récital du soprano Norah Amsellem dont on peut de plus en plus entendre la voix sur les plateaux d'opéras, et qui – ce disque nous invite à le croire – devrait occuper la scène plus régulièrement encore dans les années à venir. Car en effet, c'est bien d'une personnalité de théâtre qu'il s'agit là ! Et c'est sur cette qualité que l'artiste puise copieusement pour interpréter les mélodies de Debussy qui ouvrent son disque. De fait, ce n'est pas ce qu'on pourrait appeler un bon choix : dans ces miniatures d'un exquis raffinement, un tel lyrisme fait inévitablement figure d'excès, et le vibrato, en soi riche et généreux, emmène la chanteuse à l'opposé de la fraîcheur que musique et textes lui demandent. Toutefois, on peut constater une légèreté salutaire sur certaines mélodies, de sorte que Green passera mieux, et que Mandoline est une réussite absolue qui contredit complètement le propos global.
En revanche, le choix de chanter Duparc est nettement plus judicieux, et la réalisation s'avère concluante. L'invitation au voyage bénéficie de nuances subtiles et d'une interprétation sensible. On admirera les phrases ascendantes s'ornant d'un pianissimo progressif d'une grande pureté, respectant en tout point non seulement ce qui est écrit sur la partition mais aussi ce que cette notation suggère. L'alternance de mélodies nimbées de poésie lyrique (La vie antérieure) et d'autres au ton d'éloquence plus populaire (Au pays où se fait la guerre) est une excellente idée, propre à utiliser avantageusement ces qualités même de la voix qui gênaient Debussy. On rencontrera le sommet de l'enregistrement avec Extase, d'une grande tendresse.
Enfin, un tiers du disque est consacré à trois cycles rares de Francis Poulenc. Et c'est dans cette musique où la poésie se teinte de théâtre en prenant des tours ironiques, goguenards, ou mélodramatiques, faussement simples comme Bonjour, parfois ombrés d'un surréalisme détendu, que Norah Amsellem nous offre le meilleur d'elle-même. Que d'esprit dans Mon cadavre est doux comme un gant des Fiançailles pour rire, par exemple ! Dalton Badwin s'affirme, si besoin était, fin mélodiste, offrant un tapis de couleurs finement mêlées où la voix vint asseoir ses parfums. On regrettera que ces fragrances ne soient pas toujours plus précises (j'entends qu'un effort de diction serait le bienvenu…).
BB