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Chroniques
Richard Wagner
Das Rheingold | L’or du Rhin
Naxos se lance dans l'édition d'un Anneau du Nibelung de Richard Wagner. Cependant, au lieu d'initier une aventure discographique à très hauts risques, le label de Hong Kong propose la bande son du cycle monté à Stuttgart à partir de 1999 et disponible chez TDK [lire notre critique du DVD]. Cet ensemble diffusé à la télévision, fit l'événement pour le choix inusité de quatre metteurs en scène différents pour chacune des parties du Ring. En ouvrant ce petit coffret de deux disques, on pouvait se demander si l'absence du support visuel n'allait pas être fatale à cette production fortement caractérisée par une adéquation totale entre image et son. Force est de constater que dans une discographie d'une qualité incroyable, ce coffret s'assure une place honorable.
Le gros atout de ce Rheingold réside dans la conduite du directeur musical de l'Opéra de Stuttgart : Lothar Zagrosek. Rapide, fin et précis, son travail privilégie l'élan et l'équilibre entre les parties. Ce Wagner allégé, attentif au chant et à la fluidité du discours, est pourtant toujours soucieux du drame. Le chef allemand est secondé par un Orchestre d'État de Stuttgart assez brut de décoffrage, avec des timbres plutôt agressifs, mais ses sonorités revêches s'accordent aux options de Zagrosek.
La distribution s'avère d'une grande homogénéité. Ce n'est certes pas l'élite du chant wagnérien que l'on entend, mais, en cette période de disette de bons chanteurs capables d'assurer même les petits rôles de ces opéras, l'oreille se satisfait de l'équipe proposée par l'Opéra de Stuttgart. On peut même saluer quelques grandes incarnations : le Loge exceptionnel de Robert Künzli, la belle Fricka de Michaela Schuster, assurément l'une des étoiles montantes du chant allemand, et surtout l'Alberich engagé à l'extrême d'Esa Ruuttunen. Les deux géants sont servis avec compétence par deux solides piliers de la maison : Roland Bracht (Fasolt) et Phillip Ens (Fafner), tandis que le trio de filles du Rhin batifole avec talent : Catriona Smith (Woglinde), Maria Theresa Ullrich (Wellgunde), Margarete Joswig (Frosshilde). On sera plus sceptique devant les prestations fort engorgées et instables de Wolfgang Probst (Wotan) et de Motti Kastón (Donner).
Même si l'on reste fidèles aux grandes références wagnériennes pour ce prologue du Ring – Georg Solti (Decca), Herbert von Karajan (DGG) et Karl Böhm (Philips) –, ce Rheingold vendu à prix réduit pourra combler tous les publics, du connaisseur en quête d'une version originale au profane à la recherche d'une première approche.
PJT