Chroniques

par david verdier

Sergiu Celibidache et les Berliner Philharmoniker
Anton Bruckner | Symphonie n°7

1 Blu-ray Disc EuroArts (2012)
2011404
Sergiu Celibidache joue Bruckner | Symphonie n°7

Historique, de toute évidence. En 1992, Sergiu Celibidache retrouve les Berliner Philharmoniker après trente-huit ans d'incompréhension et de rendez-vous manqués. À la fin de la guerre, le chef roumain était pressenti pour succéder à Wilhelm Furtwängler à la tête de l'illustre phalange, peu de temps avant de se faire damer le pion par Herbert von Karajan.

Les 31 mars et 1er avril 1992, à la Schauspielhaus de Berlin, on célèbre le compositeur-talisman du Celibidache des dernières années : Anton Bruckner. En le voyant monter à son pupitre pour diriger cette Symphonie en mi majeur n°7, on se dit qu'il est loin le temps du « Celibidache debout », capable de transcender de modestes orchestres de radio pour obtenir ce son dense et granitique autour duquel gravite cette musique. Moins dynamique qu'un Günter Wand nonagénaire [lire notre critique du DVD], la direction du « Celibidache assis » vaut essentiellement pour l'incroyable concentration qui émane de son regard, toujours à l'affût du moindre écart avec la pensée musicale et son exécution à travers le geste du musicien. Les séances de répétition valent autant (voire davantage) que le concert filmé. Il faut voir de quelle manière Celibidache soumet littéralement des musiciens pas vraiment réceptifs mais qui se laissent gagner par l'émotion et la force du collectif.

Le complément-documentaire de Wolfgang Becker, titré Le triomphant retour, présente des extraits de répétition, en vis-à-vis de courtes interviews d'anciens membres du Philharmonique de Berlin. Le portrait se dessine en touches rapides autour des détails de cette rencontre voulue et organisée par les administrateurs de l'orchestre. L'histoire de ces destins croisés a de quoi donner le vertige quand on la mesure à l'aune de cet unique concert, historique de par ses conditions, mais qui aurait très bien pu être suivi de beaucoup d'autres.

Précisons que la version blu-ray propose une image retravaillée qui passe du 4:3 traditionnel au luxueux 16:9. Le changement de format ne peut malheureusement pas modifier la qualité initiale d'une image assez pauvre en contrastes et en couleurs. La qualité du son est, elle, incomparablement meilleure que dans la version DVD. La texture des graves en particulier, et cette manière inimitable d'allonger le son au delà des frontières du raisonnable pour un chef lambda. Tout ceci est clairement audible, avec une résonance et un volume naturel très impressionnants.

DV