• pages de chevet

Pour qui ne connaît pas Marcel Moyse, flûtiste qui nous a quittés presque centenaire il y a vingt ans maintenant, son ancien élève nous résume sa vie en une dizaine de page d'introduction. Naissance jurassienne en 1889, parents adoptifs, maladie respiratoire qui devient chronique… le petit Marcel est loin de ces enfants qui ont appris la musique dans des salons cossus ! Après un premier apprentissage dans le cadre familial, il rencontre à Paris ses trois véritables maîtres en musique : Hennebains, Taffanel et Gaubert. Le jeune homme, bientôt marié et père de famille, devint soliste à l'Opéra Comique. Mais si sa carrière se développa jusqu'à son apogée (milieu des années trente), il dut souvent se battre contre la misère et les aléas de la guerre qui le firent quitter Paris pour l'Argentine ou les États-Unis, pour y jouer mais surtout pour transmettre son art.

Les chapitres suivants se concentrent avec force détails sur les différentes facettes de l'homme : l'enseignant à Canterbury et Marlboro (qui détestait les élèves m'as-tu-vu…), l'auteur de livres d'exercices (dont le fameux Melody Book, inspiré d'arias et de mélodies entendues à l'Opéra, ou encore celui que peu d'étudiants ont pu travailler jusqu'au bout et qu'ils appellent la tapisserie…), l'interprète (artiste expressif à défaut d'intellectualiser) et aussi l'homme, connu pour ses colères, ses intransigeances, son amertume peut-être, mais aussi pour son sérieux pédagogique, sa disponibilité, son humour parfois vache – « Mettez un métronome dans votre petit déjeuner »,« Vous jouez comme si vous étiez à l'hôpital », etc. – dont on retrouvera un florilège en annexe.

Dans le cadre de cours publics ou privés, Moyse a enseigné à des milliers de flûtistes. C'est dire si l'homme qui parlait de son instrument comme d'une reine sans grand pouvoir mais très riche, qui s'inspirait du travail du violoniste ou du pianiste, a marqué des générations. Qu'on soit ou non musicien, on trouvera ici un beau portrait d'artiste et des réflexions intéressantes sur l'interprétation. Une mise en page aérée et une iconographie abondante ajoute le plaisir de l'œil à celui de la découverte.

LB