Recherche
Chroniques
Engelbert Humperdinck
Hänsel und Gretel | Jeannot et Margot
Decca présente une nouvelle production de Hänsel und Gretel d'Engelbert Humperdinck, filmée à Glyndebourne. À l'instar de celle du Met' sortie chez EMI, la présente est originale. Le metteur en scène Laurent Pelly traite le conte de Grimm comme un sujet d'actualité, à l'aide, entre autres, d'un travail minutieux sur les éclairages et les couleurs et d'une direction d'acteurs vivante et concise, accentuant le côté humoristique de l'œuvre. Le spectateur comprendra que l'artiste a voulu opposer la pauvreté, responsable de la faim, à la surnutrition, responsable d'obésité et de pollution.
L'histoire est donc transposée au vingtième siècle. La famille vit dans une cabane délabrée, en une zone inquiétante qui rappelle un bidonville. On remarquera un frigidaire vide à côté de la porte. Le ciel, bleu lorsque les enfants jouent, vire au vert lorsque la mère s'énerve, puis rougit quand les parents partent sauver leurs enfants. La forêt est présentée comme entièrement détruite par la pollution, avec des troncs d'arbres morts et le sol jonché de déchets. Supermarché, la maison de la sorcière présente une abondance de nourriture dans des emballages dernier cri (comme celle que rapportera le père) qui a rendu obèses les enfants prisonniers – vitrine d'une usine où dépassent d'effrayantes cheminées ayant probablement étouffé la forêt qui renaîtra avec la mort de la sorcière.
Lors de l'ouverture, on peut voir chaque interprète refuser un carton qui sera présenté à un autre – sans doute le carton maléfique de la sorcière derrière lequel on la verra en ombre chinoise lors de l'intermède. Pendant le rêve d'Hänsel et de Gretel, les enfants arborent de simples robes blanches, touche de pureté dans cet univers malsain.
La soprano Adriana Kučerová (Gretel) révèle un jeu expressif qui la montre tour à tour gaie, insolente, ou craintive. Jennifer Holloway, voix ronde et chaleureuse, est un Hänsel à la fois garnement et complice. Honnêtes vocalement, les parents sont amusants et touchants : Irmgard Vilsmaier, mère en pantalon et blouse, et Klaus Kuttler en jean et tee-shirt. Amy Freston, fine voix de soprano, livre un poétique marchand de sable. La Fée Rosée de Malin Christensson, voix plus large, est une grand-mère habillée de plastique transparent. Le ténor Wolfgang Ablinger-Sperrhacke campe la Sorcière d'une voix pleine, pas trop caricaturale ; le personnage effraie et fait rire en directrice de supermarché enlevant peu à peu son tailleur rose. L'équipe est soutenue par le London Philharmonic Orchestra que dirige le vif et concis Kazushi Ono.
SC