« Dans mes premières années, j’étais handicapé par des influences qui entravaient le développement de ma technique de composition. Je parle ici du formalisme du conservatoire de Saint-Pétersbourg, dont je me libérai cependant  – et fort heureusement – assez vite. Mais c’est à Debussy que moi-même et les autres musiciens de ma génération devons le plus. Je ne pense pas avoir remarqué un quelconque changement chez lui à la suite de notre rencontre. Mais après avoir reçu des lettres aimables et pleines d’éloges de sa part (il avait beaucoup aimé Petrouchka), je fus bien étonné de découvrir que, dans sa correspondance avec des amis musiciens de son époque, il exprimait un sentiment tout à fait différent vis-à-vis de ma musique. Était-ce de la duplicité ? Ou bien était-il contrarié par son incapacité à digérer la musique du Sacre à un moment où la jeune génération prenait ardemment parti pour celle-ci ? »

Robert Craft
Conversations avec Igor Stravinsky, Allia, 2024