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Chroniques
œuvres chorales de Gabriel Fauré et Louis Vierne
Bernard Tétu dirige l’Orchestre des Pays de Savoie et ses Solistes de Lyon
C’est en fait à une rencontre avec un double tandem musical que les mélomanes de l’agglomération lyonnaise sont invités dans le cadre fort adéquat de l’Auditorium Maurice Ravel. D’abord à un tandem de notes, avec deux compositeurs français ayant œuvré à la charnière entre deux siècles, le XIXe et le XXe, en des univers somme toute assez voisins. Gabriel Fauré, pour commencer, avec le pivot de sa musique sacrée, sa Messe de Requiem en si mineur Op.48, écrite en 1887 par un homme lui-même récemment endeuillé, dans une orchestration qu’il modifia plusieurs fois, et présentée ici dans la version de 1893 pour soprano, baryton, chœur mixte, orgue et petit orchestre, reconstituée par Jean-Michel Nectoux [lire notre critique de sa biographie du musicien, parue chez Fayard]. Fauré, encore, avec plusieurs petites pièces de musique profane, tant instrumentales que vocales, associant (plutôt bien, quoique de manière assez confuse sur le programme) le Prélude à la Passion (1890), prologue pour un drame d’Edmond Haraucourt, interprété au piano, l’autrement célèbre Pavane en fa # mineur Op.50 (1887), elle aussi plusieurs fois orchestrée, donnée dans la version pour petit orchestre avec chœur mixte ; mais encore les Duos (1873) – Puisqu’ici-bas toute âme et Pleurs d’or –, le savoureux Madrigal Op.35 (1865) pour quatre voix mixtes dédicacé au confrère André Messager, enfin Les Djinns Op.12 (1875) pour chœur mixte, brodant et virevoltant sur le poème de Victor Hugo.
Aux côtés de Fauré, Louis Vierne est un discret compagnon de concert, avec deux des Pièces de fantaisie pour orgue, extraites de la Suite n°2 Op.53 (1926) : le dense, puissant et mordoré Hymne au soleil pour commencer, la grandiose, colorée et virtuose Toccata pour finir. Ces morceaux bénéficient de deux atouts de choix : d’abord les sonorités rayonnantes de l’orgue de l’Auditorium, superbement restauré et rendu à la vie [lire notre dossier à ce propos], mais encore l’interprétation toute aussi rayonnante, claire, bien dosée de l’organiste Vincent Warnier, nouveau titulaire de l’instrument depuis quelques mois, également fort bien inspiré dans la composante organistique des autres pièces de la soirée, mais nettement moins convainquant dans les parties de piano.
L’autre tandem se situe au niveau des interprètes eux-mêmes, avec d’un côté l’ensemble local Chœurs et Solistes de Lyon-Bernard Tétu (dont la configuration va d’ailleurs changer par le biais de la symbiose avec le fameux Chœur Britten de Nicole Corti), et d’autre part quelques-uns des musiciens de l’Orchestre des Pays de Savoie. Les premiers offrent une musicalité de belle allure, une cohésion rayonnante et des solistes experts dans l’art du dialogue à deux voix (mais malheureusement restées anonymes dans la brochure de salle) ; les seconds offrent la fluidité, la souplesse, l’allant habituel de la formation désormais rajeunie. Avec art et métier, le vétéran Bernard Tétu développe une direction précise, attentive, parfois un rien trop sage mais qui amalgame avec soin les diverses composantes musicales.
GC